samedi 5 mai 2018

UN MANDAT POPULAIRE AU MANDAT PRESIDENTIEL

Demain, après plus de 9 ans les citoyens sont à nouveau conviés aux urnes pour réinsuffler un souffle démocratique à un régime politique aux abois. Jamais depuis Taëf des élections législatives n’avaient représentées un tel enjeu pour un Président de la République ni été aussi déterminantes pour la suite de son mandat. Leur impact sera par conséquent considérable sur l’ensemble du système tant politique que constitutionnel, notamment le fonctionnement des institutions, l’équilibre et la collaboration des pouvoirs, le processus décisionnel et la gouvernance, l’interprétation et le respect de la constitution ainsi que l’application des accords de Taëf et la mise en œuvre de ses clauses réformatrices restées en jachère. Des accords qui entendent attribuer un rôle fondamental à l’institution de la présidence de la République, sommet de l’Etat et clés de voûte des institutions : un rôle de régulateur institutionnel, de garant de la collaboration et de l’équilibre des pouvoirs, de gardien de la constitution, du principe de légalité mais aussi de garant du processus démocratique et de l’unité nationale. L’esprit de l’article 49, notamment son préambule, va bien au-delà de la conception étriquée et étroite communément admise d’un président protocolaire aux prérogatives formelles.

Au regard des responsabilités qui incombe à la présidence et compte tenu de la portée de sa mission constitutionnelle ce rôle doit être impérativement revenir à un président fort, c’est-à-dire un titulaire qui jouit du soutien de forces politiques structurées et donc d’un bloc parlementaire conséquent qui lui octroi tant une légitimité démocratique nationale et confessionnelle afin qu’il puisse assumer le rôle d’arbitre qui lui est imparti. Un arbitre effectif à même de trancher selon le texte constitutionnel dont il est le seul à prêter serment avant son entrée en fonction. Une lecture confirmée par les faits au regard du bilan certes relatif mais cependant positif de la première année de la présidence Aoun.
A défaut de quoi, la présidence est dans l’incapacité de remplir son rôle et d’exercer ses prérogatives - déjà fortes limitées et en décalage avec ses responsabilités constitutionnelles – avec els répercussions que l’on connaît sur l’ensemble du système politique : dysfonctionnements, blocages à répétition, atteintes à la constitution, paralysie institutionnelle, lenteur du processus décisionnel, non respect des échéances démocratiques, etc …


Aussi, il s’agit de voter tant pour les constantes de Taëf dont le Pacte national et la parité, que pour l’évolution des institutions à la lumière de la pratique des 27 dernières années fortement marquée par les circonstances, les déséquilibres et les rapports de forces. Il s’agit d’accorder un mandat populaire au mandat présidentiel afin de mettre toutes les chances de succès de son côté. Il s’agit aussi de raffermir et d’élargir l’entente dont il est issu afin qu’elle recouvre l’ensemble des thématiques nationales et qu’elle puisse relever les défis gargantuesques et existentielles dont on ne peut plus faire l’économie. Cette synergie entre le Président de la République et le premier ministre a révélée sa résilience et a permis d’obtenir des résultats non négligeables. Aussi, par soucis de cohérence et d’efficacité il faut donner une majorité présidentielle afin que le chef de l’Etat soit en mesure d’appliquer le train des réformes nécessaires et ses engagements exprimés lors de son discours d’investiture. Accorder une majorité ou un bloc parlementaire conséquent au Président de la République revient à le conforter politiquement mais aussi à le mettre face à ses responsabilités et ses engagements réformateurs. On entrerait dans la phase la plus ardue du mandat, pour certains son véritable commencement, celle qui ne consisterait pas moins qu’à nettoyer les écuries d’Augias et à aborder les questions les plus sensibles et conflictuelles. Celle qui devra initier le chantier des réformes et paver la voie à l’éclosion d’un accord interlibanais refondateur et global, celui qui soumettra toutes les ententes a l’épreuve mais qui sera aussi celui de la naissance de nouvelles ententes. Le temps de l’heure de vérité, un test décisif et un indicateur déterminant de la volonté réformatrice du mandat qui aura réussi dans sa première année à réactiver les institutions et relancer le processus démocratique.

Certes, le changement n’est pas pour demain, tant reste à accomplir ; pour ce faire personne ne sera de trop et toutes les bonnes volontés devront être mobilisés dans la bonne direction. Ni miracles ni baguette magique mais soutenir le mandat et le programme ambitieux dont il est porteur c’est déjà accomplir un pas dans la bonne direction en lieu de faire du surplace ou un nouveau recul. Un mandat ne saurait suffire à lui seul mais il pourrait du moins limiter les dégâts, de maintenir le navire à flots.

Tous les candidats porteurs de changement, et ils ne sont pas légions, animés d’un projet et d’une vision politique, économiques et sociales, de propositions de réformes politiques, institutionnelles, administratives et judiciaires doivent être considérés comme des alliés objectifs du mandat, comme une plus-value et de futurs partenaires dont la contribution est indispensable à l’édification de l’Etat de droit et des institutions. Toutes les bonnes volontés sont conviées à y prendre part.

Soutenir le mandat ne se limite pas à voter exclusivement pour les listes soutenues par le CPL ou pour tous les candidats qui s’en revendiquent ou y sont affiliés.
Certains colistiers du CPL ne représentent aucunement le changement ni la reforme, bien au contraire ils incarnent le statut quo du vide ; leur présence relève de l’opportunisme électoral et de calculs politique. Aussi, leur allégeance et leur discipline de vote au parlement est loin d être acquise.

Tout candidat intègre et compétent qui accède à l’hémicycle est une recrue de choix, un atout pour le mandat et un apport à l’action législative et à la bonne gouvernance. Des nouveaux visages peuvent s’avérer être des soutiens circonstanciels du président selon les projets et les sujets, voire même lui permettre de se défaire de certains liens pesants et d’alliances d’intérêts embarrassantes qui entravent son action et son élan réformateur. Toutes les demandes de réformes versent dans le sens de l’édification de l’Etat et renforcent le projet présidentiel, tant celles qui émanent de l’intérieur que certaines préconisées par les instances internationales  en matière de gouvernance, de lutte contre la corruption, de transparence, de défense des droits de l’homme, de fonctionnement administratif, de politique économique, fiscale et financière à l’instar des réformes et recommandations, notamment structurelle et sectorielles faites par la communauté international lors de la conférence CEDRE ou l’insistance sur la politique de distanciation et la mise en œuvre d’une stratégie défensive.   

Aussi je souhaite sincèrement le succès de certaines figurent indépendantes mais aussi de figurent de l’opposition qui ont fait la preuve de sérieux, de bonne foi, de dynamisme et d’initiative. Il est vital de bénéficier d’une opposition active, constructive et objective car gouverner c’est avant tout collaborer, coopérer et se lancer dans une compétition pour le bien public, une concurrence et un débat productif et rationnel au service du bien commun dans le respect de la loi et régit par les règles du jeu démocratique et institutionnel.










mercredi 2 mai 2018

ATOMES CROCHUS ET LANGUE FOURCHUE

"L'Iran a menti", le nouveau one man show en anglais de Netanyahu à l’attention d’un audimat acquis, au premier rang duquel le président américain Donald Trump qui n’en doutons pas sera bon public. Contrairement à Saint Thomas, ce dernier est disposé à croire sans voir, quitte parfois à voir sans croire. Mise en scène soignée, ton dramatique, suspens garanti, Netanyahu a entamé son intervention par ces mots : "Ce soir, nous allons vous montrer quelque chose que le monde n'a jamais vu." Un effet d’annonce assuré et un nouveau round dans la bataille de la communication menée par Israël contre un accord qu’il n’a cessé de dénoncer à corps et à cris et à la signature duquel il s’était opposé en vain. 
 
Pour Netanyahu, il « offre une voie royale à l’Iran vers un arsenal atomique », et « n'aurait jamais dû exister.". L’objectif est clair : Il s’agit de convaincre le président américain de casser l’accord et de s’assurer du soutien des Etats-Unis en cas de confrontation futur entre Israël et l’Iran. D’ailleurs, quelques instants après son discours, la Knesset a voté une loi simplifiant le processus de décision d’entrer en guerre sans devoir réunir l’ensemble du gouvernement. Désormais cette cette responsabilité revient au cabinet restreint de sécurité qui peut décider d’une opération militaire ou d’une guerre sans consulter le gouvernement. Un paragraphe autorise même le premier ministre et le ministre de la Défense, seuls, de décider d’une telle opération en cas de « conditions extrêmes ». 
Dans la foulée, alors que les regards étaient rivés sur la prestation de Netanyahu, le Parlement israélien a aussi adopté mardi en première lecture le très controversé projet de Loi qui consacrerait le caractère juif de l’Etat dans les lois fondamentales du pays et définirait Israël comme « le foyer national du peuple juif ».


Il s'agirait de plus de 100 000 documents relatifs au projet "AMAD" et que se seraient procurés les services de renseignements Israéliens; certains constitueraient des preuves "nouvelles" et "inédites" que l'Iran poursuit un programme nucléaire clandestin et qu'il aurait menti en affirmant ne pas chercher à développer des armes nucléaires. Nous avons souvenir d'une époque où juste un document aurait suffi ...
Des informations qualifiées de réelles et d'authentiques par le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo, un faucon fraichement débarqué de la CIA. Il faut dire que ces « révélations » confortent le président Trump dans son hostilité à cet accord et sa volonté maintes fois exprimée de s’en retirer. Autant dire que Netanyahu prêche un convaincu et que sa performance tombe à point nommé à moins de 10 jours de la fin de l'ultimatum posé par Trump aux Européens pour obtenir des concessions iraniennes, faute de quoi les Etats-Unis pourraient se retirer de l'accord sur le nucléaire iranien signée en Juillet (le JCPOA) à Vienne entre Téhéran et les « 5+1 ». Il semblerait du reste, qu’une décision en ce sens était déjà quasiment prise mais qu’il reste à définir les modalités de sortie. D’ailleurs, sa réaction ne s’est pas faite attendre et dès lundi il estimait que « c'est un accord qui n'a pas été approuvé par beaucoup de monde et c'est un accord horrible pour les Etats-Unis … Cela montre que j’ai eu raison à 100% ». En effet, hormis Israël, l'Arabie Saoudite et quelques pays du Golfe cet accord n'aura obtenu que l'aval de l'ensemble de la communauté internationale, des 5 membres permanents du Conseil de sécurité ainsi que de l'Union européenne ...

100 000 documents mais rien de nouveau sous le soleil, en tout cas aucun qui atteste que l'Iran aurait violé les termes du JCPOA. La majorité des informations révélées par Netanyahu étaient déjà connues et ont déterminé le régime d’inspection mis en place par l’accord sur le nucléaire. Pour les Européens, la masse d'informations recueillies par Israël ne justifie pas une remise en cause de l’accord ; bien au contraire elles sembleraient conforter son bien-fondé. Quand à l'AIEA, en charge de l'application et du respect de l'accord, elle a renvoyé aux conclusions contenues dans un de ses rapports de 2015 et selon lesquelles, contrairement à ce que dit M. Netanyahu, elle n'a "aucune indication crédible d'activités en Iran liées au développement d'un engin explosif nucléaire après 2009". Du reste, des documents clés exposés par Netanyahu avaient déjà été soumis et étudiés par l'agence dès 2005 et qu'elle avait rendus publics en 2011. Son Directeur général, Yukiya Amano, avait par ailleurs déclaré en décembre 2015 que « l'Agence estime également que ces activités n'ont pas dépassé le stade des études scientifiques et de faisabilité et de l'acquisition de certaines compétences et capacités techniques pertinentes. L'Agence ne possède aucune indication crédible d'activités correspondant à la mise au point d'un engin explosif nucléaire en Iran après 2009."

L’exposé théâtrale de Netanyahu intervient dans un contexte extrêmement tendu, Israël mettant la pression à l’Iran sur tous les fronts, multipliant les offensives aériennes contre les positions iraniennes en Syrie. Il a eu lieu au lendemain de frappes importantes probablement menées par Israël dans les régions d’Alep et d’Hama. Parmi les cibles, la Brigade 47, une base militaire dans la province d’Hama. L’explosion d’un entrepôt de missiles sol-air récemment livres par l’Iran y a été mesurée à 2,6 sur l’échelle de Richter.
Israël n’a toujours pas revendiqué la responsabilité de l’opération qui aurait faite au moins 26 morts, dont une majorité de conseillers militaires iraniens selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Il faut dire qu’Israël confirme ou dément rarement ses attaques du moins pas dans l’immédiat. Le timing est des plus opportuns au moment où l’Iran est soumis à d’intenses pressions et où Israël peut bénéficier du soutien plein et inconditionnel de son allié américain, un allié que Tel Aviv aimerait voir plus impliqué en Syrie, mais aussi de celui de nombreux pays arabes notamment du Golfe. Déterminé à imposer ses lignes rouges, Israël étend désormais ses opérations à l’ensemble du territoire syrien et non plus seulement au Sud afin d’empêcher toute implantation des forces iraniennes ou de leurs proxys en Syrie. Selon des officiels américains de haut rang cités par la chaine NBC News, les dernières frappes auraient été menées par des F-15 Israéliens contre une base syrienne abritant un stock de missiles anti-aériens iranien. Cependant selon Teshrin, organe de presse officiel du gouvernement syrien, qui cite des « sources sur le terrain », les frappes seraient le fait de 9 missiles balistiques lancés à partir de bases américano-britanniques dans le Nord de la Jordanie.
Quoiqu’il en soit, elles ont eu lieu quelques heures après la visite du Secrétaire d’Etat Mike Pompeo à Tel Aviv lors de laquelle il a conforté Netanyahu dans sa posture anti-iranienne. A l’issu de leur rencontre les deux hommes ont réaffirmé leur volonté commune d’endiguer le projet iranien de « domination régionale » ainsi que leur détermination à l’empêcher de se doter de l’arme nucléaire. Cette rencontre a été précédée d’une conversation téléphonique entre le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le Président américain Donald Trump. La Maison Blanche a déclaré que les deux dirigeants ont discuté des menaces et des défis auxquels le Moyen-Orient est confronté, « notamment les problèmes posés par les activités déstabilisatrices du régime iranien ».

Certes, si l’Iran est, sur de nombreux théâtres, un facteur d’instabilité au Moyen-Orient et s’il constitue une telle menace régionale, cela est due essentiellement aux choix stratégiques hasardeux et aux interventions désastreuses des Etats-Unis et de leurs alliés régionaux depuis 2003. On pourrait en dire tout autant d’Israël et de l’Arabie Saoudite qui n’ont fait qu’alimenter les conflits régionaux et contribuer à exacerber les tensions. Belliqueux, provocateur et agressif, l’Etat hébreux est l’une des sources principales de l’instabilité du Moyen Orient. Il y maintient un climat de guerre et de confrontation permanent, entretient les tensions et s’oppose à tout accord, bilatéral ou multilatéral, à même d’instaurer une détente ou des mesures en faveur de la paix, du moins à la mise en œuvre d’un dialogue ou d’un processus de paix. Imperméable à toute concession, il recourt en tout lieu et tout temps à la violence et à la force. Concédons aussi que l’Iran aurait mise en place un programme secret d’enrichissement de l’uranium dans le but inavoué de posséder l’arme nucléaire. N’est-ce pas aussi le cas d’Israël qui contrairement à l’Iran est déjà en possession de la bombe atomique depuis le milieu des années 60 ?
Officiellement son programme nucléaire était destiné à la recherche atomique bien qu’il se soit secrètement doté d’armes nucléaires. Israël n’a jamais confirmé ni démenti sa capacité à utiliser l’atome à des fins nucléaires s’en tenant à une doctrine d’ambiguïté délibérée qui constitue la règle israélienne en la matière. D’autant plus qu’il n’a presque jamais subi de pression ni même a été interrogé sur la question, encore moins soumis à des inspections internationales. Israël qui interpelle l’AIEA alors qu’il a toujours refusé catégoriquement que ses installations nucléaires militaires soient contrôlées par l’AIEA.
Israël possède des ogives nucléaires capables d’être transportées par les missiles balistiques Jéricho I, II et III, des sous-marins de classe Dolphin dotés missiles de croisières Popeye Turbo, ainsi que des avions F 15 et F 16.
Est-il aussi besoin de rappeler qu’Israël, contrairement à l’Iran, n’a jamais adhéré au « TNP », Traité de non-prolifération nucléaire, en dépit des demandes répétées de l’AIEA ?

Concernant le nucléaire, les armes de destructions massives, ainsi que sur toutes les questions relevant du droit international, Israël continue de bénéficier d’un blanc seing et d’une impunité absolus ainsi que d’un deux poids, deux mesures à toute épreuve.