jeudi 26 janvier 2017

La Loi de 1960 ou la prorogation sont deux facettes du vide

Le 31 Octobre prenait fin la longue vacance présidentielle. Cependant l’élection d’un président fort, pour la première fois depuis l’adoption du « document d’entente nationale » à Taëf, mettait un terme au vide de 27 ans qui aura prévalu à la tête de l’Etat. En effet, à quelques rares exceptions, les présidents qui se sont succédés n’auront pas été en mesure de remplir le rôle dévolu à cette institution clés. Une situation dont pâtirent tant la parité que la gouvernance et l’ensemble des institutions étatiques. L’élection d’un président fort et représentatif est un cas de figure inédit à même d'instaurer une pratique institutionnelle nouvelle. Celle ci serait fondée sur une lecture adaptée, plus conforme à l’esprit des accords de Taëf, et à même d’en améliorer la pratique.

Nous sommes désormais en présence d’un chef de l’Etat  imperméable à toute forme de chantage et dont la conduite n’est dictée que par le texte constitutionnel. Un président qui a les moyens politiques de jouer son rôle institutionnel, la capacité de s’opposer mais aussi celle de prendre des initiatives. Elu grâce à un consensus qu’il aura initié et non subi, il n’en sera pas l’otage contrairement à ses prédécesseurs.
Si son mandat a effectivement débuté sous le signe de l’entente celle ci ne se fera pas au détriment de l’intérêt général, encore moins des impératifs de sa mission constitutionnelle. 
Aussi, il aura recours à tous les moyens institutionnels dont il dispose d’autant plus qu’il bénéficie d’un bloc politique conséquent et de solides alliances. Il sera ainsi en mesure d’agir conformément à sa mission de gardien de la Constitution, de garant du principe de légalité, de l’ordre démocratique, de la parité et du pacte.

Ses propos lors de la dernière séance du Conseil des ministres en sont la parfaite illustration. En réponse à la demande formulée par le ministre de l'Intérieur que soit examiné le dossier du comité de supervision des élections législatives, le président a déclaré qu’« Entre la prorogation et le vide, je choisirai le vide. » et d’ajouter : « Que personne ne nous menace du vide ou de la prorogation du mandat des députés. » 
A ceux qui cherchent à lui imposer le vide ou la prorogation, le président a signifié que la prorogation est le vide en soi ; celui instauré par le statu quo mortifère en vigueur depuis 2005. Une manière de dire qu'il ne signera en aucun cas le décret de convocation du collège électoral si la loi 1960 est toujours en vigueur. Un avertissement qui relève plus de l'incitation que de la menace et qui a pour effet de provoquer un sursaut salutaire. Il est de sa responsabilité de rappeler à l'ordre toutes les parties afin qu'elles redoublent d'effort. Il est en effet inconcevable et inacceptable qu'après deux prorogations illégales le parlement n'est pas été en mesure d'accoucher d'une nouvelle loi électorale. Le chef de l'Etat  s'évertue  à forcer le débat et à avancer des propositions concrètes. Plus de trois projets qui prennent en compte les inquiétudes de toutes les parties ont été soumis à discussion tout en insistant sur l'adoption de critères unifiés quand au mode de scrutin et au découpage des circonscriptions. 
Ainsi, le président ne se contente pas juste d’œuvrer à la tenue d’élections législatives dans les délais impartis mais aussi de s’assurer qu’elles aient lieues selon une loi électorale juste, équitable, équilibrée et moderne faisant la part tant à la représentation confessionnelle que politique. En dépit du risque encouru – le report des législatives représentant un revers pour son mandat - Il refuse néanmoins le chantage qui consiste à le forcer, pressé par le temps et les courts délais, à choisir entre la loi de 60 ou le vide. Il tient en cela ses engagements, antérieurs à son élection, et reste fidèle à ses positions,  à son discours d’investiture et à son rôle constitutionnel.

Il y a fort à parier que le président ne pliera pas et qu’il usera au mieux de l’ensemble de ses prérogatives même si sa marge de manœuvre reste limitée. Il n’hésitera pas si cela s’avérait nécessaire à avoir recours par l’intermédiaire du gouvernement à un décret-loi pour adopter un nouveau code électoral.