Le salut pour les "chrétiens d'Orient" passera-t-il par
François Fillon? L'ancien
premier ministre et candidat malheureux des Républicains à la présidentielle,
aujourd'hui retiré de la vie politique, va créer une fondation en faveur des
chrétiens d'Orient. "J'ai décidé de consacrer une partie de mon temps (ce
n'est pas ce qui lui manque désormais) et de mon énergie à l'action en faveur
de ces opprimés, au travers d'une fondation aujourd'hui en cours de
création".
"La
cause des minorités d'Orient, particulièrement celle des chrétiens, me tient
fortement à coeur. Les drames qu'ont connus ces populations au cours des
dernières années dans une région traversée par les guerres, les tensions
religieuses et le fondamentalisme, sont à l'origine d'épreuves humaines,
familiales et communautaires souvent indicibles" a écrit l'ancien premier
ministre et candidat malheureux à la présidentielle, éternel défenseur des
opprimés en tout genre surtout ceux de France et de Navarre. Une sollicitude bouleversante et un élan de solidarité bienvenu à
l'égard de ceux qu'il décrit comme des minorités opprimées.
J'aimerai
néanmoins partager quelques reflexions avec M. Fillon, et de tous ceux pris
d'une tardive compassion à l'égard des chrétiens d'Orient et qui soudainement
se préoccupent de leur sort. A présent que l'islamophobe est de mise, que les
discours sont décomplexés, les chrétiens d'Orient, jadis condamnés à l'omerta,
relégués à l'index pour cause de laïcité pointilleuse et rigoureuse, sont dans
l'air du temps, récupérés souvent pour des intentions peu avouables.
Nul
n'est minoritaire en sont pays et sur sa propre terre; la condition des
chrétiens d'Orient est loin d'être unique et uniforme; derrière ce terme vague
et impropre il existe une multitude de communautés, de cultures, de rites, de
nationalités, de traditions, de croyances et de situations mais aussi et
surtout une multitude d'individualités et de personnalités singulières. Il
s'agit de communautés et non de minorités, leur histoire et leur vécu ne sont
pas exclusivement et constamment faits d'oppression. Certes, pour des
considérations essentiellement démographiques, les chrétiens sont plus exposés
à terme aux conséquences des crises et des guerres qui ravagent le monde arabe,
à la dissolution du tissu socio-culturel et au délitement des structures
étatiques. Ils sont aussi plus que tout autre victimes de ségrégations, de
vexations, de marginalisation et en proie à un fort sentiment d'insécurité.
Cependant, leurs concitoyens musulmans subissent tout autant l'impact
des guerres, des crises économiques et sociales, du chômage, de l'insécurité,
des dictatures, du terrorisme et de la montée du radicalisme religieux. Ils
sont tout autant, et pour des raisons similaires, candidats à l'immigration et
qu'ensemble ils font la queue devant les consulats et ambassades occidentales.
Ils sont tout autant victimes de la pauvreté, de la corruption étatique, de la
répression policière et militaire, de l'injustice sociale et de l'absence
d'Etat de droit et de respect des droits de l'Homme. Ils sont également privés
de droits et de citoyenneté politiques et des libertés individuelles et
collectives fondamentales ainsi que de processus démocratique.
Ils sont avant tout victimes des choix hasardeux, des politiques
catastrophiques et des considérations géopolitiques des pays occidentaux et
autres grandes puissances. Cela ne dédouane en aucune manière les autorités
religieuses islamiques et les concitoyens musulmans de leurs responsabilités et
devoirs à l'égard des chrétiens.
Les
chrétiens ne sont ni les "protégés" de l'Islam ni de personne, encore
moins de régimes qui oppressent leur peuple; ni Dihimmitude ni capitulations;
ni des étrangers "tolérés" en "terre d'Islam" ni la
cinquième colonne de l'Occident, encore moins une excroissance du christianisme
occidental ou un reliquat, une survivance exotique des origines du
christianisme. Ils n'aspirent pas moins qu'à être des citoyens à part entière,
en droits et en devoirs, de leur patrie.
La
France, l'Europe et l'ensemble de la communauté internationale devraient en
premier lieu adopter des politiques justes et responsables, cesser d'alimenter
les conflits, de soutenir des régimes anachroniques et totalitaires, de leur
vendre des armes et des instruments de répressions et accompagner ces pays sur
la voie d'un développement économique équilibré et durable. Promouvoir les
droits de l'homme, l'alternance démocratique, le pluralisme culturel et
politique pour l'ensemble des citoyens et dénoncer d'une même voix, sans deux
poids deux mesures, les atteintes à la dignité humaine et aux libertés
fondamentales, qu'elles touchent les chrétiens ou l'ensemble des communautés. Pour ce faire l'Occident devra avant
tout préserver en son sein la coexistence, la diversité religieuse et
culturelle, la laïcité bien comprise et les valeurs des Lumières afin d'éviter
l'appel du gouffre du nationalisme fermé, des identités crispées, des
populismes trompeurs et des va-t-en-guerre et autres émules du "choc des
civilisations".
Le salut, tant en Orient qu'en Occident passe par la
coexistence et la préservation du vivre en commun. Si les démocraties libérales
en venaient à s'en éloigner, ce qui représenterait un recul démocratique, c'est
l'avenir tant des chrétiens que des musulmans qui s'en trouverait hypothéqué. C'est de ce modèle de coexistence, qui les protège ainsi que leur concitoyens, que les chrétiens sont protecteurs.
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